dimanche 3 novembre 2013

Le Magnifique : quand Philippe de Broca pastiche Gérard de Villiers


Artistes : Gérard de Villiers est mort. Agé de 83 ans, il laisse derrière lui 200 aventures de S.A.S. écoulées à 120 millions d'exemplaires. Son Altesse Sérénissime, c'est Malko Linge : prince autrichien, agent de la CIA, libertin. Les polars de Gérard de Villiers sont considérés tout à la fois comme bien documentés et très beaufs, prenants et sexistes, voire racistes. Avec des titres improbables et des couvertures sexy ou vulgos - selon les points de vue. C'est que de Villiers ne faisait pas dans la dentelle - son ami Claude Lanzmann, le réalisateur de Shoah, évoque même ses régulières "éructations nazies" (lire l'excellent papier sur de Villiers dans M Le Magazine du Monde).



De Villiers regrettait que son oeuvre n'ait pas connu le succès au cinéma : seulement deux adaptations françaises. Deux bides. C'est oublier que la meilleure "adaptation" cinématographique de S.A.S. au cinéma, c'est Philippe de Broca qui l'a réalisée en 1973, avec Le Magnifique. Evidemment il ne s'agit pas d'une transposition fidèle mais d'un pastiche aussi drôle qu'intelligent (lire "Philippe de Broca est un cinéaste baroque"). Car qu'y voit-on ? Un héros de roman qui est agent secret, beau, riche et experts en combats : Bob Saint-Clar, incarné par le magnifique Jean-Paul Belmondo. Mais on y voit aussi l'écrivain peu glamour à l'origine de ce personnage : François Merlin, incarné par le magnifique sus-nommé. Saint-Clar emprunte autant à James Bond qu'à Malko Linge.

Quant à de Villiers, il ne faut pas le rechercher dans Merlin le désenchanté mais dans Charron, l'éditeur antipathique interprété brillamment par Vittorio Caprioli. D'ailleurs la ressemblance physique est frappante. Repose donc en paix, Gérard : toi qui espérais que Malko connaisse la gloire sur grand écran une fois ta mort survenue, à l'instar de Ian Fleming avec son 007 ; toi qui anticipais dans tes romans les coups d'état et les conflits armés, tu n'as pas su voir que Philippe de Broca - comme il l'avait fait pour Tintin avec L'Homme de Rio - t'avait rendu le plus beau des hommages en signant une des meilleures comédies françaises de tous les temps.

Anderton


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