vendredi 25 septembre 2015

Boomerang : entre paf et pschit

 
En salles : Vous connaissez l’expression : toutes les familles ont un cadavre dans le placard. C’est bien sûr vrai pour la famille d’Antoine et Agathe, deux personnages principaux de Boomerang, le film de François Favrat sorti sur nos écrans .
 

Un cadavre dans le placard à double titre d’ailleurs, car non seulement ils ont perdu leur mère quand ils avaient respectivement dix et cinq ans, mais le secret qui entoure cette disparition devient un vrai fardeau, notamment pour Antoine, qui ne se satisfait plus des approximations et réponses toutes faites qu’on lui assène depuis l’enfance. Mal dans sa peau, crise de la quarantaine, garde alternée de ses deux filles dont une ado renfrognée, une ex- femme qui l’a quitté depuis six mois et qui bosse avec sa sœur, le chantier et son boulot de conducteur de travaux. Pas gai, hein ? Heureusement dans tout ça, il y a sa petite sœur.
 
Agathe est son exacte opposée, plutôt enjouée et optimiste, bien décidée à ne pas se faire des nœuds au cerveau, d’autant qu’elle n’a plus que quelques souvenirs diffus de celle qu’elle n’appelle que par son prénom. Pourtant, Antoine essaie de soigner son mal-être en consultant régulièrement un psy, mais il achoppe régulièrement sur le même problème : son incapacité à nouer un dialogue familial pour en savoir plus sur le décès de sa mère. A l’occasion du tragique anniversaire et alors qu’ils se rendent tous les deux sur l’île de Noirmoutier, Antoine décide de remonter le fil de l’histoire. C’est sans compter sur le pouvoir du secret, qui tel un nœud se serre à mesurer à mesure que l’on veut le relâcher, et sur le refus de tout son entourage d’ouvrir la boite de Pandore.
 
Moustache et coup de la montre
 
La réalisation et le jeu des acteurs sont brillants. On s’abandonne avec délectation à ce Cluedo familial. Une mention particulière pour Laurent Lafitte (Antoine) et Mélanie Laurent (Agathe) qui campent chacun leur personnage avec une remarquable justesse. C’est si criant de vérité que vous vous identifiez tantôt à l’un, tantôt à l’autre. Pour autant, le film se déroule tel un long fleuve tranquille, loin du suspense hitchcockien que l’on nous promettait. C’est à ce point vrai, que François Favrat se sent obligé de nous imposer en début de film un flash-back qui n’apporte rien au schmilblick. Quant à la bande son qui dans ce genre de film normalement sert l’intrigue, elle est d’une pauvreté absolue.
 
Il reste le secret, ce fichu secret. Sa toxicité : tout le monde trinque et trinque fort, enfants, petits-enfants, mari, jusqu’aux domestiques. Sa capacité à durer, à s’emberlificoter : il suffit de voir comment Charles, le pater familias (joué par Wladimir Yordanoff, et affublé sois dit en passant d’une magnifique moustache), se débat dans un déni désespéré pour, trente ans après les faits, ajouter du mensonge au mensonge. Très fort, le coup de la montre. Son habileté à passer de génération en génération : Antoine lui-même est révulsé par la moindre question sur sa mère. Enfin, sa propension à se reproduire : Margaux, la fille d’Antoine, a elle aussi un secret. Lui faudra-t-il aussi inventer une légende ?
 
Je vous laisse sur une des dernières répliques de Charles (ah cette moustache !) : "Je veux bien parler, mais pas ici, pas maintenant". Voilà tout est dit, c’est jamais le bon lieu, c’est jamais le bon moment.
 
Moustachement vôtre,
Jean-Jacques Castella
 

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