mardi 21 novembre 2017

Marvin ou la belle éducation : un moment de grâce

En salles (le 22 novembre) : Réalisé par Anne FontaineMarvin ou la belle éducation est beaucoup plus qu’une adaptation librement inspirée du roman d’Edouard Louis, Eddy Bellegueule. C’est une variation sur l’exil et le retour à la terre natale. C’est une ode au regard créateur de l’autre. C’est un film qui fait croire en l’homme, à l’amour et à son essence divine. A partager.



Transfiguration
 
Il paraît qu’Anne Fontaine ne fait que des films sur la transgression. En quoi quitter sa famille pour devenir soi est-il transgressif ? Il paraît que l’homme est un loup pour l’homme. Et que penser des doux à qui l’on promet le Royaume de Dieu et qui ont ce regard d’amour qui fait renaître celui qu’ils ont simplement aimé. Il paraît que les acteurs sont autocentrés, comme nous d’ailleurs, et uniquement obsédés par le succès, le fric. Il me semble qu’en rester là, c’est négliger le pouvoir de l’amour et sa capacité à nous transfigurer.
 
Amour

Parce que sur le papier, tout n’est effectivement pas rose. Marvin (Finnegan Oldfield et Jules Porier) grandit dans les Vosges, sublimement filmées, entouré de parents aimants mais incultes (Catherine Salée, Grégory Gadebois) et de frères et sœurs peu bienveillants. C’est un enfant sensible, doux et différent à l’homosexualité supposée et condamnée. C’est grâce à sa principale de collège, Madame Clément, délicatement interprétée par Catherine Mouchet, puis plus tard lorsqu’il devient étudiant à Abel Pinto, fragile Vincent Macaigne, que Marvin se révèlera auteur et acteur aux côtés d’Isabelle Huppert qui joue son propre rôle ; et parviendra à devenir celui qu’il est. C’est donc un film sur le regard, sur la soif d’exister et sur l’incommunicabilité transcendée par l’amour.
 

 
Délicatesse
 
La mise en scène fait s’alterner scènes d’aujourd’hui et moments de l’enfance. Un mélange en continu entre l’avant et l’après, qui fait le maintenant. Car la vie est dans le mouvement. Chaque souvenir dont Marvin s’inspire pour raconter son devenir, renvoie vers son passé. Cet effet de style pourrait être pesant, mais très vite on s’habitue à ces allers-retours qui font penser à la psychanalyse. Ce que je suis aujourd’hui s’est décidé hier mais ne me limite pas pour demain.
 
Mais, surtout...

Ce n’est pas un film de plus sur le destin et les rencontres qui le font basculer dans un sens puis l’autre. C’est le récit d’une aventure humaine, des émotions qui la traversent et des joies et réconciliations qu’elle permet. C’est une parabole de vie qui ne juge pas alors que le conformisme ambiant et les raccourcis scénaristiques le font si souvent ailleurs. On a sans doute tous un peu de Marvin en nous : des parents qui ne nous comprennent pas, des amis qui nous accueillent et des figures tutélaires qui nous portent au-delà de nos pensées limitantes. Le secret : croire que notre différence est aussi notre force. Merci Anne Fontaine pour ce moment de grâce.
 
Annie Hall
 

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